Les sans-papiers ont des droits!

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Vivez-vous ou travaillez-vous en Suisse sans permis de séjour?

Environ 150 000 personnes dans votre cas vivent en Suisse sans permis de séjour. La plupart des «sans-papiers» ou «clandestin-e-s» sont des travailleuses et travailleurs sans statut de séjour régulier, majoritairement dans le nettoyage, dans des ménages privés, sur les chantiers, dans les hôtels et restaurants, dans les transports ou dans des exploitations agricoles.

Que vous soyez arrivé-e en Suisse sans visa ou sans permis de séjour valable ou que vous soyez resté-e après l’échéance de votre permis de séjour, vous avez des droits fondamentaux. Les droits humains ne sont liés à aucun statut de séjour. Ils sont universels.

Ce site internet contient des informations utiles pour la vie au quotidien et vous renseigne sur vos droits. Vous trouverez également de l’aide auprès des bureaux de conseil pour les sans-papiers dans votre canton de résidence. Présentez-leur en confiance tous les aspects de votre situation particulière. Ces organismes sont indépendants et soumis au devoir de confidentialité. Il n’est jamais trop tôt ou trop tard pour se renseigner. Vous trouverez ici plusieurs adresses utiles.

Vous trouverez aussi auprès du syndicat Unia plus d’informations. De manière générale, gardez bien en tête que vos documents et biens personnels vous appartiennent. Aucune personne ni autorité n’a le droit de vous les confisquer. De même, comme il est important que les faits soient prouvés. Conservez bien tous les éléments probants: SMS, lettres, contrats, agendas, etc.

D’autres brochures abordent des informations qui peuvent aussi vous être utiles: par exemple «Mes droits au travail» sur le site internet d’Unia, ou dans votre secrétariat régional d’Unia.

Réponses à des sujets importants

1. Régularisation du séjour

Les personnes venant de l’extérieur de l’UE ont très peu de possibilités d’obtenir un permis de séjour en Suisse. En tant que sans-papiers, il n’y a guère que le permis pour cas de rigueur ou pour regroupement familial pour régulariser sa situation.

  • Permis pour cas de rigueur

    La loi prévoit actuellement que les sans-papiers sans autorisation de séjour doivent immédiatement quitter le pays, sauf en s’ils peuvent prouver leur «situation personnelle d’extrême gravité» (dit «cas de rigueur»).

    Les décisions sur les demandes pour cas de rigueur relèvent de la compétence des cantons: concrètement, une demande doit être présentée à l’autorité de migration du canton où on réside. Dans chaque cas, la situation personnelle globale est examinée individuellement. La pratique dans ce domaine est différente d’un canton à l’autre et dépend fortement des contextes politiques. De plus, en cas d’approbation cantonale, la Confédération doit aussi donner son accord à la régularisation. Elle le fait dans la plupart des cas.

    Généralement, les autorités estiment qu’un cas de rigueur n’est pas réalisé lorsque le séjour est inférieur à cinq ans. Ce n’est que pour les séjours plus longs que les demandes sont sérieusement examinées. Différents critères prouvant une «intégration poussée» sont pris en compte, comme la durée de séjour en Suisse, l’indépendance financière, l’intégration, la santé, le casier judiciaire et d’autres encore. Concrètement, de nombreux sans-papiers qui sont en Suisse depuis plus de 10 ans (ou 5 ans pour les familles avec enfants scolarisés), qui sont financièrement indépendants, sans casier judiciaire et qui maîtrisent la langue nationale de leur lieu de domicile.

    Les requérant-e-s d’asile qui ont reçu une décision d’asile négative entrée en force peuvent aussi demander une autorisation de séjour pour cas de rigueur en cas de séjour connu des autorités en Suisse depuis au moins 5 ans. Toutefois, dans la pratique, 5 ans sont loin d'être suffisants dans de nombreux cantons.

    Les victimes du crime de traite des êtres humains sont aussi protégées de manière spécifique. Même si vous êtes consentant-e, si vous avez été contraint-e de travailler sous la menace, la violence ou à cause de prétendues dettes, par exemple en cas d’exploitation sexuelle, d’exploitation de votre force de travail, d’exploitation domestique ou encore de contrainte à commettre des infractions ou à mendier, vous pouvez être soutenu-e et obtenir une régularisation.

  • Regroupement familial

    Mariage ou partenariat enregistré

    Toute personne a le droit de se marier, mais ce n’est pas simple dans la pratique quand on est sans-papiers parce que les ressortissant-e-s étrangèr-e-s qui désirent le faire doivent prouver qu’ils ou elles séjournent légalement en Suisse. Les bureaux d’état civil doivent en outre communiquer aux autorités compétentes l’identité des époux et épouses dont le séjour est irrégulier. Le Tribunal fédéral a toutefois décidé que le mariage en Suisse ne peut pas être refusé de manière générale aux sans-papiers. Ce qui signifie que chaque cas doit être examiné individuellement et que l'office des migrations doit délivrer une "tolérance de séjour" pour qu’une procédure de préparation du mariage puisse être effectuée. La pratique est différente d’un canton à l’autre. Renseignez-vous auprès d'un centre de conseil sur la procédure.

    Les couples de même sexe peuvent se marier. Ils peuvent aussi convertir en mariage un partenariat enregistré préalablement conclu, en soumettant une déclaration commune à un officier de l'état civil.

    En cas de soupçon de mariage ou de partenariat de complaisance (« mariage blanc »), l’officier d’état civil doit refuser de le célébrer. Vous n’avez pas d’autre option que de vous rendre dans le pays dont vous avez la nationalité, soit pour vous y marier ou conclure un partenariat puis demander un regroupement familial en Suisse, soit pour y demander un visa pour la préparation du mariage ou du partenariat en Suisse, afin que vous puissiez entrer légalement en Suisse pour la cérémonie.

    En cas de divorce ou de séparation (dissolution du ménage commun) durant les trois premières années, et même si vous êtes victime de violence conjugale, vous risquez de perdre votre permis de séjour B. Selon votre situation (avec ou sans enfants), il faut alors demander un permis pour cas de rigueur, si vous avez déjà vécu en Suisse pendant plusieurs années.

    Autres cas

    Si vous êtes mineur-e et que votre parent direct a une situation régulière, cette personne peut demander un permis pour vous. Il en va de même si vous êtes mère d’un-e mineur-e qui a la nationalité suisse, une des nationalités européennes ou qui a une situation régulière. Cependant les conditions sont très strictes.

  • Apatridie

    Vous êtes apatride en Suisse si vous n’avez pas ou plus de nationalité sans que cela soit de votre faute, et que vous n’avez aucune possibilité d’en obtenir une. Vous pouvez demander au Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) la reconnaissance d'apatridie pour recevoir un permis de séjour (B) et un document de voyage pour aller à l'étranger. Si vous êtes mineur-e, vous pourrez aussi déposer une demande de naturalisation facilitée après avoir séjourné 5 ans en Suisse. Toutefois, la procédure est longue et très compliquée. Vous devez notamment démontrer qu’aucun Etat ne vous reconnaît comme ressortissant-e. Cette reconnaissance est pourtant nécessaire car vous risquez de vous trouver (de façon répétée) en détention administrative, même si votre expulsion est illicite.

2. Santé

Être sans-papiers implique souvent de vivre dans des conditions difficiles. Le travail est souvent pénible et nuisible pour la santé. Vous subissez en plus le stress d’une vie sans permis, loin de vos proches. Cela peut avoir un impact négatif sur votre santé.

Les guides de santé de la Croix-Rouge Suisse (CRS), de Caritas et de l’Office fédéral de la santé (OFSP) vous fournissent des informations plus détaillées (vous pouvez vous les procurer auprès des bureaux de conseil ou sur www.migesplus.ch).

  • Droit aux soins

    Tous les établissements de soins et tous les médecins de Suisse sont tenus de prodiguer une assistance dans les situations d’urgence. Si vous avez besoin de soins médicaux de base, que vous soyez malade ou blessé-e, vous devez être soigné-e, avec ou sans assurance maladie. Dans les hôpitaux, il y a des assistant-e-s sociaux qui peuvent vous aider en cas de problème.

    Les médecins et le personnel hospitalier sont soumis au secret professionnel. Ils-elles n’ont pas le droit de communiquer vos nom, date de naissance ou coordonnées à la police ou à l’office des migrations.

    Conseil: diverses organisations privées offrent localement des soins gratuits ou à bas coût. Dans certains cantons, les hôpitaux publics ont aussi le devoir d’assurer une prise en charge médicale de base à la charge des autorités publiques sans que vous n’ayez à payer de facture car certaines institutions (services sociaux, autorités cantonales, hôpitaux, etc.) ont constitué des fonds ou des provisions pour cela. Si vous n’avez pas d'assurance maladie et que les institutions publiques locales ne sont pas obligées de payer votre traitement, vous devrez peut-être prendre les frais à votre charge. Dans ce cas, le paiement peut être fait en plusieurs versements.

  • Droit à l’assurance-maladie

    Vous avez le droit de souscrire une assurance-maladie. Les seules données personnelles requises pour souscrire une assurance-maladie sont le nom, le prénom, la date de naissance et une adresse de contact.

    Toutes les personnes assurées selon la loi ont droit au même catalogue de prestations, indépendamment de leur statut de séjour. Les frais pour les traitements médicaux, les hospitalisations, les grossesses et les accouchements sont pris en charge par la caisse maladie. Les soins dentaires, en revanche, ne sont pas couverts par l’assurance de base.

    L’assurance-maladie n’est pas gratuite en Suisse. Vous payez en effet non seulement un montant mensuel (« prime ») mais vous devez aussi prendre à votre charge une partie des frais médicaux (« franchise annuelle ») et régler vous-même 10% des frais annuels de traitement (« quote-part »). Dans certains cantons, les personnes à faibles revenus peuvent solliciter un rabais sur les primes de l’assurance maladie. Les caisses d’assurance-maladie sont aussi soumises au secret professionnel. Elles ne sont autorisées à transmettre vos données personnelles aux autorités de police des étrangers que lorsque vous y avez consenti par écrit ou, s’il n’est pas possible d’obtenir son consentement, s’il en va de votre intérêt, ce qui n’est jamais le cas. Nous vous conseillons malgré tout d’indiquer l’adresse d’une tierce-personne « légale » de confiance lors de la souscription de l’assurance.

    Attention! Lorsque l’on ne possède pas de couverture maladie, les difficultés surviennent quant au suivi médical, au paiement des soins reçus et aux traitements. Il y a de grandes différences entre les cantons.

    Vous devez souscrire une assurance dans les 3 mois suivant votre arrivée en Suisse. En cas d’affiliation tardive (après 3 mois suivant l’arrivée), l’assureur peut exiger un supplément de prime de 50% pendant une période équivalente à 2 fois la durée du retard. Toutefois alors, l’assurance ne déploie pas ses effets de manière rétroactive, bien que vous deviez payer la prime rétroactivement.

    Beaucoup de personnes s’affilient à des assurances complémentaires (qui ne sont pas obligatoires) sans pouvoir les payer: les conséquences sont alors importantes, en matière de dette et d’entrave à une régularisation future.

    Conseil: ne signez jamais rien si vous n’êtes pas sûr-e d’avoir compris de quoi il retourne.

  • Droit à l’assurance accidents

    Tou-te-s les employé-e-s en Suisse sont assurés à titre obligatoire contre les accidents et les maladies professionnels même sans titre de séjour, y compris les employé-e-s à domicile, les apprentis, les stagiaires et les bénévoles. Si vous travaillez au moins 8 heures par semaine auprès d’un même employeur, vous êtes également assuré-e contre les accidents non professionnels. Les primes de l’assurance obligatoire contre les accidents et maladies professionnels sont à la charge de l’employeur. Les primes de l’assurance obligatoire contre les accidents non professionnels sont en principe à la charge de l’employé, sauf si l’employeur la prend volontairement en charge.

    Attention! Même si votre employeur se dérobe à son obligation en matière d’assurances sociales, vous êtes couvert et vous percevrez les prestations. Si vous êtes traité-e médicalement à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, vous n’avez pas à payer la facture : les frais sont à la charge de l’assurance accident de votre employeur.

    Attention: les caisses d’assurance accident sont généralement soumises au secret professionnel. La loi leur impose toutefois d’informer l'autorité migratoire quand elles relèvent des indices de travail au noir, c’est-à-dire non déclaré aux assurances sociales.

  • Droits reproductifs (contraception, interruption volontaire de grossesse, etc.) et prévention des infections sexuellement transmissibles (VIH, sida, etc.)

    Les médecins, les hôpitaux et les bureaux de conseil spécialisés conseillent sur les moyens de contraception féminins ou masculins et l’interruption de grossesse.

    L’usage du préservatif vous protège contre le HIV/sida et contre d’autres maladies sexuellement transmissibles. Il est en vente libre dans toutes les pharmacies et dans les grands magasins, voire distribué gratuitement pas des associations. Vous pouvez faire un test HIV pour une somme modique ou gratuitement et de manière anonyme dans les services spécialisés.

    Des informations sur le thème du VIH/sida sont disponibles en plusieurs langues sur les sites www.aids.ch ou www.migesplus.ch.

3. Travail

Lorsque vous convenez avec une personne de travailler pour elle et qu’elle vous promet un salaire, cet accord est considéré comme un contrat de travail. Même si l’accord n’est que verbal. Un contrat de travail ne vous permet pas de régulariser votre situation, mais il vous garantit des conditions de travail minimales.

  • Droits concernant le travail
    • droit à des conditions de travail et de salaire conforme aux conventions collectives, aux usages locaux, à la profession et aux contrats types de travail.
    • pour les mineurs: il est interdit de travailler en dessous de 15 ans et la durée ne doit pas excéder 9 heures de travail par jour au maximum. Le travail de nuit et du dimanche est interdit en dessous de 18 ans. Lorsque vous résidez chez votre employeur en tant qu’employé-e de maison, celui-ci doit vous fournir un logement préservant votre intimité.
    • délais de résiliation appropriés: l’employeur doit vous informer à temps lorsqu’il ne souhaite plus vous employer.
    • droit aux prélèvements AVS/AI.

    On sait qu’en général les sans-papiers touchent des salaires trop bas, voire pas de salaire du tout et c’est illégal. En cas d’échec du dialogue direct avec l’employeur, vous pouvez, dans certains cantons, saisir le tribunal des Prud’hommes.

    Vous pouvez aussi donner une procuration à quelqu’un pour engager une procédure prud’hommale. Vous pouvez ainsi faire valoir vos droits par voie judiciaire avec effet rétroactif jusqu’à cinq ans, même si vous avez quitté la Suisse.

    Conseil: posez des questions sur le travail lorsque vous vous présentez la première fois chez un employeur : combien serez-vous payé-e ? Combien d’heures devrez-vous travailler ? Quelles tâches devrez-vous accomplir ? Convenez si possible d’horaires de travail clairs. C’est particulièrement important lorsque vous habitez chez votre employeur. Convenez aussi de vos jours de congé. Demandez à avoir cet accord sous forme écrite (contrat de travail) : l’employeur y est légalement tenu.

    Conseil: notez chaque jour ce que vous avez fait et combien d’heures vous avez travaillé. Gardez les preuves des instructions de travail par écrit (papier, sms, email, etc.) et prenez des photos de votre place de travail. Cela vous aidera à faire valoir vos droits auprès de l’employeur en cas de problème.

    Conseil: en adhérant à un syndicat, vous serez conseillé-e et soutenu-e à chaque étape. N'hésitez pas à vous renseigner auprès d'un secrétariat syndical près de chez vous.

    Attention! Plusieurs personnes sont victimes de traite des êtres humains sans en être conscient-e. Si vous travaillez en Suisse, quel que soit le secteur, à la suite de fausses promesses ou de tromperies sur les conditions de travail, si vous êtes contraint-e de travailler sous la menace, la violence ou pour rembourser une dette importante, et cela même avec votre accord, vous pouvez être soutenu-e et sortir de cette situation. Renseignez-vous auprès d’un membre de la Plateforme suisse contre la traite

  • Assurances sociales

    Les assurances sociales sont obligatoires pour toute personne vivant et travaillant en Suisse. Les assurances principales sont

    • l’assurance vieillesse (AVS),
    • l’assurance invalidité (AI),
    • les allocations familiales,
    • l’assurance chômage (AC),
    • l’assurance accident (LAA),
    • les allocations pour perte de gain (APG),
    • la prévoyance professionnelle (LPP),
    • et l’assurance maternité.

    Tous les employeurs doivent déclarer leurs employé-e-s aux assurances sociales.

    Attention! Être déclaré aux assurances sociales n’est pas la même chose qu’avoir un permis. Ton statut de séjour reste irrégulier.

    Attention! Si vous êtes annoncé-e auprès des assurances sociales, vous recevez un certificat d’assurance (certificat AVS). Vous serez toujours employé-e illégalement mais vous serez assuré-e contre l’invalidité et, à l’âge de la retraite, vous pourrez toucher une petite rente, même si vous n’êtes plus en Suisse.

    Attention! Certains employeurs douteux déduisent en effet les cotisations du salaire sans les reverser aux assurances. Si vous n’avez pas reçu de certificat AVS, cela signifie que votre employeur ne vous a pas assuré-e.

    Conseil: parlez à votre employeur de l’obligation d’être déclaré-e aux assurances sociales. Dans tous les cas, nous vous recommandons de vous renseigner au préalable sur la pratique dans votre canton de résidence.

    Conseil: renseignez-vous impérativement sur votre retraite si vous vouliez quitter la Suisse.

    Allocations familiales et APG: vous avez droit à ces allocations si vous vous êtes annoncé-e auprès de la caisse cantonale compétente et avez un certificat AVS. Toutefois, par peur de dénonciation, beaucoup de personnes n’osent pas les demander.

    • Indemnités en cas d’insolvabilité: vous avez droit à cette indemnité si votre employeur est en faillite!
    • Indemnités de l’AC: vous n’avez droit ni aux indemnités de l’AC ni aux mesures du marché du travail.

4. Formation

Les sans-papiers ont des droits et des possibilités spécifiques. Ils peuvent aller à l’école et reçoivent souvent un soutien supplémentaire. Si vous avez un enfant ou si vous êtes vous-même mineur-e, renseignez-vous sur les conditions de scolarité dans votre canton dans un bureau de conseil.

  • Éducation de la petite enfance

    Dans de nombreux cantons, les crèches et espaces de vie enfantine sont accessibles aux sans-papiers et sont souvent soutenu-e-s financièrement. Dans plusieurs cantons, il est possible, voire obligatoire, pour les enfants sans-papiers de fréquenter l’école enfantine.

  • Scolarité obligatoire

    Pendant toute la scolarité obligatoire, jusqu’à 16 ans, les écoles publiques doivent inscrire tous les enfants qui vivent en Suisse quel que soit leur statut de séjour. L'accès à l'enseignement obligatoire est gratuit.

    Conseil: avant vos 16 ans, prenez contact avec le conseiller en orientation de votre école et un bureau de conseil!

  • Scolarité post-obligatoire

    En principe, il n'existe aucun droit à la formation post-obligatoire. Cependant, dans certains cantons, il est également possible de fréquenter des écoles secondaires II (lycée/gymnase/collège/écoles de maturité professionnelle ou spécialisée), une Université ou une Haute Ecole, si certaines conditions sont remplies. Certaines offres de transition sont aussi possibles, sur demande. Avec les prestataires non étatiques, le problème du financement se pose.

  • Formation professionnelle

    La formation professionnelle n’est pas possible sans autorisation de séjour. Toutefois, si vous avez une perspective concrète de place d’apprentissage, vous pouvez demander une autorisation de séjour pour la durée de cet apprentissage. Les conditions suivantes doivent être remplies:

    • avoir déjà suivi votre scolarité en Suisse pendant au moins 5 ans,
    • déposer votre demande dans un délai de 12 mois après la fin de votre scolarité obligatoire,
    • être «bien intégré» et respecter l’ordre juridique suisse,
    • déclarer ouvertement son identité
    • et, en parallèle, l’employeur potentiel doit avoir présenté à l’autorité cantonale compétente sa volonté de vous engager.

    Attention! Il n’existe aucun droit de principe à bénéficier d’une autorisation de commencer et de terminer un apprentissage et une autorisation n’est éventuellement délivrée que si toutes les conditions sont remplies. Le risque est grand: si votre demande est rejetée, vous risquez d’être expulsé-e de Suisse, ainsi que votre famille. En particulier, c’est la situation de l’ensemble de la famille qui sera examinée. De plus, il n’existe à ce stade pas de garantie que le permis soit renouvelé à l’issue de la formation, même si, dans les faits, c’est majoritairement le cas.

  • Soutien aux familles

    Pour les familles avec enfants, il existe également des possibilités de réductions financières dans de nombreux domaines de la vie (scolarité, mais aussi dans les loisirs culturels, artistiques, etc.).

    Conseil: l’école et le corps enseignant ne sont pas autorisé-e-s à fournir des coordonnées des mineur-e-s à la police. Les enseignant-e-s sont des personnes de confiance qui ont presque toujours de la compréhension pour la situation difficile des enfants sans-papiers. Participez aux soirées de parents d’élèves et aux autres manifestations de l’école. Faites-vous accompagner si vous avez peur.

5. Cours de langue et activités de lien social

  • Cours de langue et activités de lien social

    Nous vous conseillons d’apprendre la langue locale, tant à l’oral qu’à l’écrit. Cela vous sera très utile pour votre vie quotidienne en Suisse. Vous pourrez mieux participer socialement, vous constituer un réseau et défendre plus efficacement vos intérêts.  

    Il existe localement plusieurs cours de langue gratuits ou à bas coût à des horaires compatibles avec un travail dispensés par les autorités publiques ou par des organisations de terrain. Dans beaucoup de cantons, il existe aussi diverses activités qui vous sont accessibles afin de développer vos contacts, vous exprimer et vous informer : plusieurs organisations de terrain proposent des ateliers de conversation ainsi que des activités sociales, politiques, artistiques, culturelles et sportives accessibles. 

    L’acquisition de la langue locale, des usages locaux et le tissage de liens sociaux sont également des conditions préalables fondamentales lorsqu’il s’agit de régulariser votre statut de séjour. 

    Conseil: l’institution de formation pour adultes ECAP vous permet sans risque de suivre divers cours. 

6. Logement

  • Logement

    Sans statut de séjour, il est difficile de trouver un logement. Les sans-papiers sont souvent contraints de louer des logements inadéquats beaucoup trop chers. Vous pouvez valablement conclure un contrat de bail. Cependant, les bailleurs ou les régies demandent souvent une preuve de la régularité de votre séjour. Si tel est le cas, la sous-location reste donc la solution.  

    Généralement, les personnes trouvent un logement en demandant à une personne qui vit ici légalement de le louer pour elles. Cette personne s’expose toutefois à des sanctions : elle risque jusqu’à 12 mois de détention même si, dans la pratique, elle est généralement condamnée à payer des jours-amendes. 

    La personne qui vous loge n’a pas le droit de demander un loyer supérieur aux usages locaux. Le prix demandé ne doit pas non plus être beaucoup plus élevé que celui versé par le-la locataire précédent-e. 

    La personne qui vous loge peut aussi demander une caution à hauteur de 3 mois de loyer au maximum. Si vous payez le loyer et que vous ne causez pas de dégâts, cette caution vous sera remboursée lorsque vous quitterez le logement. N’oubliez pas de demander une quittance pour la caution. 

    Si vous êtes une travailleuse ou un travailleur domestique qui vit chez son employeur, il existe des conditions spécifiques qui vous protègent. 

    Conseil: il est important de fournir une preuve de paiement. Demandez à la personne qui vous loge de vous fournir des bulletins de versement pour que vous puissiez payer le loyer sous votre vrai nom. Les bulletins de versement sont les meilleurs justificatifs de loyer payé et facilitent si nécessaire des demandes ultérieures. 

    Conseil: lorsque la personne qui vous loge réclame un loyer trop élevé ou ne rembourse pas la caution, essayez de négocier avec elle avec l’aide d’un bureau de conseil. En cas d’échec, vous pouvez, dans certains cantons, faire appel gratuitement à une commission de conciliation. Si la personne qui vous loge est un «marchand de sommeil», c’est-à-dire qu’elle vous propose un logement impropre à la location pour un loyer disproportionné (lieux insalubres, cave, etc.), elle risque d’être condamnée-e à des peines fermes privatives de liberté ainsi que financières pour avoir abusé de votre situation de faiblesse.

7. Police et justice

Aux yeux des autorités, vous violez la loi en tant que sans-papiers par votre simple présence en Suisse. Travailler sans permis est une infraction supplémentaire à la loi. La police et la justice doivent cependant vous informer de vos droits et les respecter.

  • Contrôles policiers et droits
    • La police n'est pas autorisée à interpeller sans raison n'importe quel individu sur la voie publique: elle est cependant habilitée à vous appréhender et à vérifier votre identité dans tout endroit public ou privé si elle a des motifs de penser que vous avez un lien avec la commission d'une infraction. 
    • Votre participation à une manifestation non autorisée (ou à une manifestation autorisée mais au cours de laquelle des violences ont été commises) peut autoriser la police à vous appréhender. 

    • Comme vous n’avez pas de permis de séjour, vous serez probablement emmené-e au poste de police. La police peut vous interroger sans présence d’un avocat pendant les 24 premières heures d’audition. Après 24h et avant une éventuelle détention, demandez à être conseillé-e par un avocat (gratuitement). 

    • Vous serez ensuite soumis à un interrogatoire. Les enquêteurs doivent vous traiter correctement : toute menace ou exaction physique ou psychique est proscrite. 

    • Demandez la présence d’un-e interprète lors de l’interrogatoire. Ne répondez ou ne signez jamais si vous n’avez pas bien compris ce qu’on vous demande ou si vous n’êtes pas d’accord avec ce qu’on vous dit. 

    • Vous avez toujours le droit de garder le silence. Vous n’êtes pas tenu-e de révéler votre adresse, le nom de votre employeur ou celui de vos ami-e-s. Vous pouvez répondre: «Je n’ai rien à dire». Il vaut mieux ne rien dire que de mentir. Les mensonges sont généralement décelés et vous y perdez votre crédibilité. Vous devez toutefois décliner votre identité : nom, prénom, date de naissance et lieu d’origine. 

    • La police n’a pas le droit de procéder à une fouille corporelle sans raison lors d’un contrôle simple : pas de palpation ni de fouille au corps intime. Toutefois, elle peut vous fouiller une fois au poste de police si elle l’estime nécessaire. En cas de fouille à nu-e, elle doit impérativement être faite en deux temps (haut puis bas, ou inversement, mais jamais entièrement dans le même temps) et par une personne du même sexe que vous. Toutefois, si vous êtes une personne trans*, votre demande à être fouillé-e par une personne dont le sexe inscrit à l’état civil correspond à votre identité de genre devrait être considérée. Si votre corps est dénudé pour la fouille, par exemple pour une fouille intime, seul du personnel avec une formation médicale, en principe ne faisant pas partie du corps de police, peut exécuter cet examen. Si vous êtes soumis-e à une fouille vaginale ou anale, celle-ci doit être effectuée par un-e médecin ou un-e auxiliaire de santé qui ne doit pas nécessairement être de même sexe que le vôtre. Vous ne pouvez pas refuser d’être fouillé-e mais vous pouvez refuser une fouille anale ou vaginale si celle-ci vous cause des souffrances importantes. 

    • La police ne peut procéder à des perquisitions à domicile qu’avec un mandat de perquisition. En vertu de la loi sur les étrangers et l'intégration, la police peut, dans une procédure de renvoi ou d’expulsion, vous fouiller et saisir vos biens et vos documents pour mettre en sûreté ses documents de voyage ou d’identité, même sans décision judiciaire. 

    • Demandez des quittances pour les objets confisqués. Demandez à ce que vos notes personnelles, votre agenda, votre téléphone ou des éléments similaires soient gardés sous clé. Les fonctionnaires de police ne sont autorisés ni à les consulter, ni à en faire des copies. Seul-e un-e juge d’instruction peut lever le séquestre. 

    • Verrouillez votre téléphone avec un code afin que la police ne puisse pas accéder facilement à vos messages et contacts. Vous n’êtes jamais obligé-e de communiquer votre code à qui que ce soit. 

    • Signalez tout débordement à l’organisation de défense des droits de l’homme «Augenauf». 

    En principe, si vous n'avez pas commis d'autre infraction que le séjour et le travail irrégulier, vous pouvez sortir après l’interrogatoire. 

    A chaque ouverture ou suspension d’instruction pénale, arrestation et libération ainsi que tout jugement pénal, les autorités communiquent entre elles: concrètement, la police vous dénonce aux autorités de migration après vous avoir interrogée et un-e juge rend une décision de renvoi ou d’expulsion de Suisse en direction d’un pays dont vous avez la nationalité avec une interdiction de séjour sur le territoire d’au moins 2 à 3 ans. Vous êtes passible d’une amende ou d’une peine d’emprisonnement, d’une peine pécuniaire ou d’une peine de privation de liberté d’1 an ou plus. L’autorité judiciaire peut aussi ordonner la perquisition de votre logement ou d’autres locaux si elle soupçonne que vous y êtes caché-e ou que vos documents de voyage s’y trouvent. Elle peut en outre ordonner votre détention en vue de votre renvoi ou de votre expulsion. Cela signifie que vous restez en détention jusqu’à ce que les autorités aient réglé les modalités de votre départ. La légalité de cette détention doit être examinée par un juge dans un délai de 96 heures. La durée maximale de la détention en vue de votre renvoi ou de votre expulsion, plus une éventuelle détention pour insoumission, est de 18 mois (12 mois pour les mineurs âgés de 15 à 18 ans). Vous pouvez faire recours contre une décision de détention, mais vous devrez régler les frais vous-même. La prolongation de détention doit de plus être examinée tous les 3 mois par un-e juge dans le cadre d’une audition. 

    Votre employeur risque aussi des sanctions pénales (amende, peine pécuniaire ou peine de privation de liberté). 

    En ce qui concerne vos ami-e-s: la majorité des personnes qui sont en contact avec vous ne risquent aucune sanction pénale sauf si les autorités considèrent qu’elles «facilitent  votre séjour (par exemple, si elles vous logent). Elles risquent alors généralement une peine pécuniaire limitée.  

    Conseil: en cas de contrôle par la police, rendez-vous immédiatement auprès d’un bureau de conseil juridique.

8. Soutien en situation d’urgence

  • Soutien en situation d’urgence

    En cas de besoin, vous n’avez pas droit à l’aide sociale mais vous avez droit à une aide dans les situations de détresse concernant l’alimentation, le logement, l’habillement et les frais médicaux de base. Toutefois, cela implique de vous annoncer aux autorités cantonales et complique une demande de régularisation car vous n’êtes plus autonome financièrement. 

    Si vous êtes débouté-e de votre demande d’asile ou si vous avez reçu une non entrée en matière (NEM), vous avez droit à une aide d’urgence qui vous garantit un minimum vital, sous certaines conditions. 

9. Discrimination

  • Discrimination

    Les discriminations violent les droits et la dignité humaines. De nombreuses personnes en sont victimes en Suisse, dans leur vie privée, face aux autorités, dans la rue ou au travail.  

    Les lois suisses luttent très mal contre le racisme et les autres types de discrimination. Les personnes confrontées aux discriminations se heurtent à différents obstacles, notamment le problème des preuves et la crainte de conséquences sociales, politiques, juridiques et financières. 

    Nous sommes solidaires! Chaque jour, les organisations solidaires et les syndicats s’emploient à améliorer les lois et leur application afin que le racisme et tous les autres types de discrimination puissent être sanctionnés de façon efficace. Conservez le plus de preuves possibles et prenez contact avec un bureau de conseil: vous serez soutenu-e.

10. Risque d’être dénoncé-e aux autorités migratoires

  • Risque d’être dénoncé-e aux autorités migratoires

    La loi oblige certaines autorités à communiquer aux autorités migratoires les données vous concernant, quand elles soupçonnent ou sont informées de l’irrégularité de votre séjour. Il est important de savoir lesquelles.

    Dans la plupart des cantons, ces autorités doivent systématiquement communiquer aux autorités migratoires les données vous concernant:

    • les autorités policières, les autorités d’instruction pénale et les juridictions pénales
    • les autorités fiscales et les autorités chargées de l’application des assurances sociales
    • les autorités chargées de l’asile
    • les bureau d’état civil (hormis souvent pour l’établissement d’actes de naissance ou de reconnaissance de paternité)
    • les autorités d'inspection du travail, de marché du travail, d'assurance-chômage et d'emploi

    Au contraire, vous pouvez généralement vous fier par principe à ces organismes:

    • les autorités et établissements scolaires
    • les autorités, services de santé et personnel médical
    • les autorités chargées de l’application de l’assurance-maladie
    • les centres LAVI de protection des victimes
    • les avocats
    • les associations (bureaux de conseil, permanences juridiques, œuvres d’entraide)
    • les syndicats 

    Conseil: cette liste n’est pas exhaustive et il existe des différences en fonction des cantons. En cas de doute pour savoir à qui vous pouvez ou non faire confiance, notamment concernant les tribunaux civils et les tribunaux des prud’hommes, consultez un bureau de conseil ou un syndicat! 

Revendications d'Unia

Nous revendiquons la régularisation collective 

Les sans-papiers secondés par des groupes de soutien se battent depuis des années pour une régularisation collective. Quelques succès ont été obtenus : des milliers de permis de séjour ont été délivrés et le droit à une assurance-maladie est acquis. De nouvelles perspectives peuvent s’ouvrir dans les régions où les sans-papiers sont bien organisé-e-s. Par exemple, la campagne «Opération Papyrus» à Genève a conduit à la régularisation en 2017 et 2018 de plus de 2 800 personnes. Les critères cumulatifs pour la régularisation étaient les suivants : 

  • durée de séjour de 5 ans pour les familles avec enfant(s) scolarisé(s). Le critère de 5 ans s'appliquait à l’un des membres de la famille;  
  • durée de séjour de 10 ans pour les célibataires et couples sans enfant; 
  • «intégration» réussie ; le niveau de connaissance linguistique A2 (oral) devait être en cours d’attestation; 
  • absence de condamnation pénale, de condamnation répétée pour séjour non régulier et travail sans autorisation ainsi que de décision d’interdiction d'entrée en Suisse successive; 
  • indépendance financière complète et absence de dette; 
  • être en emploi. 

Une bonne raison de s’engager auprès des différents collectifs de soutien aux sans-papiers dans votre région  

Conseil: en tant que travailleuse ou travailleur sans-papiers, vous pouvez adhérer à un syndicat sans risque. Chaque jour, les syndicats sont actifs au niveau politique et s’engagent pour une société juste et solidaire. Parce qu’il représente les intérêts de tous ses membres, quelle que soit leur situation légale, un syndicat peut vous conseiller et vous accompagner, par exemple dans une procédure juridique. Le syndicat répondra à toutes vos questions, notamment concernant les frais modiques d’adhésion.

Adresses utiles

Cette page a été produite par le syndicat Unia, avec le concours des antennes pour sans-papiers.